Cahier d’exercices (1939)

La rentrée des classes, tout le monde en parle. Comme tous les ans, les journaux, les chaînes de télévision et les publicités nous informent sur cet événement exceptionnel (et inattendu ?) qu’est la rentrée des classes ! Et chacun de nous ressortir ces marronniers (articles ou reportages sur des sujets qui reviennent régulièrement et qui remplissent allègrement les espaces disponibles).
Donc il va de soi que iSundgau ne fera pas exception et vous parlera de cette info inouïe qu’est cette rentrée !

Septembre est le mois où le soleil darde ses derniers rayons chauds, où les petits matins frisquets et brumeux nous rappellent que l’été tire sur sa fin, où la nature nous donne les fruits qu’il faut engranger pour les longs mois d’hiver à venir, et … où les enfants reprennent le chemin de l’école.
Et aussi, comme chaque année, le ministre de l’éducation nationale du moment « invente » une nouvelle mission pour les instituteurs ou les professeurs, comme la leçon de morale pour cette année.
Rien de neuf sous le soleil. Tous ceux qui ont plus de 50 ans se rappellent des cours d’instruction civique, des dictées laborieuses et des explications de textes intégrant la morale et le respect. L’instituteur ou la religieuse institutrice se chargeait, souvent très durement, de nous inculquer les bonnes manières !

L’écomusée de Haute-Alsace organisera même une épreuve sur le thème : « Saurez-vous passer votre certificat d’études ? ». Ce certificat était la finalité des études primaires et ne pas l’obtenir vous faisait passer pour « l’idiot du village ».
Le cahier d’exercices

En faisant du rangement dans la maison familiale, je suis tombée en extase devant un cahier datant de 1939 (de février à juin), regroupant les exercices que les meilleurs élèves devaient résoudre en classe : le cahier du cours S1.

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Sans parler de la difficulté, je reste ébahie par la calligraphie et le soin apporté à ces devoirs écrits avec un porte-plume.
Un de ces élèves était mon oncle. Né en 1925, il avait donc 14 ans en 1939. Enrôlé de force dans l’armée allemande à 18 ans, il n’est jamais revenu et a été porté disparu. Longtemps, ses parents et ses sœurs ont espéré et rêvé son retour !
Et c’est avec tristesse que j’ai compulsé ce cahier.

Ci-dessus, quelques exemples de problèmes, dictées et autres exercices.

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Les jours se suivent et ne se ressemblent pas. Tout ce qui reluit n’est pas or. Quand on n’a pas ce que l’on aime, il faut aimer ce que l’on a. Le Nil fertilise l’Égypte par ses inondations périodiques. Il ne faut pas se mettre en colère après les choses parce que cela ne leur fait absolument rien. Ces enfants chérissent leurs parents et ne voudraient rien faire qui pût leur déplaire. Ces hommes ont leurs défauts comme vous avez les vôtres. Chaque âge a ses plaisirs. Que de moyens de transport actuellement employés ! Voyez dans la rue ces voitures de toutes sortes, ces automobiles, ces bicyclettes ; voyez filer à travers la campagne ces wagons bondés de voyageurs ; sur la rivière, voyez ces bateaux.
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Dictée : Un bon voisin
Je me dis :  » Tu es tranquille et au chaud dans ta maison avec ton chien et tes chevaux ; ton toit est bien réparé contre la pluie et la neige ; tu n’as pas de souci pour ta femme et tes enfants. Mais voilà un tel qui a son plafond écroulé, et les berceaux de ses petits exposés à tous les vents ; voilà cette pauvre veuve dont la maison a brûlé la semaine passée ; voilà ce vieillard qui n’a plus son fils pour lui piocher son morceau de terre ; voilà ces trois orphelins qui n’ont ni père ni mère pour leur moissonner leur seigle ou pour leur battre leur châtaignier. Qui est-ce qui ira à leur secours ? Allons, c’est moi ! Donnons-nous de la peine pour leur en enlever un peu. »

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On peut constater que les textes, soit des exercices, soit des dictées, sont souvent imprégnés d’un sens moral.
Et enfin, pour le final, une rédaction composée par le jeune Jean-Pierre, fils d’un fermier du village. Lui aussi a eu un destin tragique que nous relaterons ultérieurement. Ci-dessous, une ode au travail de la femme du paysan. L’original est intégré dans le document pdf mentionné plus bas .

Composition française : La fermière
On glorifie le paysan et l’on a bien raison parce que sans le cultivateur que mangerais-tu ? Tu n’aurais pas de pain, pas de beurre, pas de fromage, pas de lait, ni d’autres choses encore. Mais on ne pense pas suffisamment à la fermière, car c’est elle qui fait beaucoup de travaux. Les gens des villes se figurent qu’elle ne donne que les grains à la volaille ou ne garde que le bétail au pâturage. Au printemps, quand les poules ont couvé les œufs, elle surveille les couvées. Elle élève les poulets avec soin pour pouvoir les engraisser au plus tôt comme aussi les canetons. Le matin et le soir elle prépare la pâtée aux porcs et la leur porte dans des seaux. Dans certaines régions de notre pays, la fermière va traire les belles vaches grasses qui attendent depuis longtemps pour être dégagées de leur bon lait succulent. Toutes les semaines, elle va au marché pour vendre les poulets ou les pourceaux engraissés ou des légumes. En été, elle aide aux foins, elle prend les grandes fourchées de foin que le fermier met sur la voiture et les pose l’une derrière l’autre le long de la voiture. Pendant la moisson, elle met les céréales en gerbes. Mais elle ne fait pas que ces travaux, à la maison elle est maman et ménagère, elle soigne ses enfants qui deviendront forts et robustes, en même temps qu’elle fait d’autres travaux. C’est elle qui est la boulangère car elle fait du pain excellent. Elle soigne aussi un petit jardin qui lui donne certains légumes. Elle prépare les repas à la famille, elle travaille pendant le jour sans perdre de temps. Elle est laborieuse, économe, soigneuse et il faut la respecter.

fleche – Voir plusieurs pages du cahier (document pdf)

rentree-01École primaire de Carspach – année 1939 (clic pour agrandir)

Source : iSundgau

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