Les anciennes épidémies

L’expression « choisir entre la peste et le choléra » exprime le dilemme que représente le fait de devoir choisir entre deux choses aussi mauvaises l’une que l’autre !

L’histoire nous relate un grand nombre d’épidémies. Pourtant, chaque fois qu’une maladie épidémique s’est déclarée, presque tout le monde s’est livré à des conjectures les plus étranges. « Jamais, disait-on, on n’a vu rien de semblable, jamais on n’a observé une si grande mortalité. » Et on interrogeait les astres, les dieux, l’atmosphère, la terre… Et on s’empressait de faire honneur à tous les remèdes infaillibles que les charlatans, ainsi que des hommes convaincus et plus ou moins éclairés, répandaient parmi les populations effrayées.

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Nous allons vous relater quelques terribles épidémies qui eurent lieu dans les temps anciens, la « peste d’Athènes » qui ressemble plutôt au choléra, l’horrible peste à bubons, la variole et l’influenza.

– La peste d’Athènes

Le mot « peste » en grec, s’appliquaient autrefois à tout fléau, en général, et en particulier aux maladies épidémiques, ordinairement très différentes de celle qui est appelée peste par les auteurs modernes. La « peste d’Athènes » semble plutôt s’apparenter à une forme de choléra.

(Détails relatés par Thucydide, historien athénien)
Une des plus anciennes épidémies dont l’histoire nous ait légué des détails, était celle connue sous le nom de peste d’Athènes. La maladie se déclara en 431 ans avant J.C., au commencement de l’été. Elle attaqua d’abord les habitants du Pirée qui prétendirent que leurs ennemis avaient empoisonné les puits.
Puis la ville haute est envahie à son tour et aussitôt la mortalité devint effrayante. Des hommes bien portants étaient subitement pris de violentes chaleurs et douleurs à la tête, les yeux rougissaient et s’enflammaient, la langue et la gorge devenaient sanglantes et renvoyaient une haleine très fétide. Puis survinrent des éternuements et de l’enrouement. Ensuite, l’affection gagna la poitrine et produisit une toux violente accompagnée de vomissements. La peau n’était pas très chaude au toucher, mais elle était extrêmement rouge et couverte de petits boutons vésiculeux et d’ulcérations. Mais la chaleur interne du corps était si grande que les malades repoussaient les plus légers vêtements ou couvertures. La mort arriva le plus souvent vers le septième ou le neuvième jour. Sinon, le mal descendait dans le ventre, provoquait une diarrhée excessive et tuait beaucoup d’individus par épuisement.
Les malades à qui étaient prodigués tous les soins ne succombaient pas moins que ceux qui étaient abandonnés à eux-mêmes. Des familles entières s’éteignirent. Ceux qui avaient échappé à la mort pouvaient s’occuper des malades atteints, car ils constataient que ce mal n’atteignait pas deux fois le même individu.
Mais le mal sévissait partout. Chacun ensevelissait les morts comme il pouvait. De nombreux bûchers furent érigés, des fosses communes furent creusées.
La peste d’Athènes dura deux années. Elle ne disparut pas tout à fait. Cinq années plus tard elle sévit encore une année.
Les médecins ne suffirent pas à traiter les malades, car d’une part ils avaient à traiter une affection qu’ils ne connaissaient pas, et d’autre part, presque tous ceux qui approchaient les malades succombaient ; aussi parmi tous les remèdes que l’on essaya, il n’en resta aucun dont seulement on put dire qu’il avait été utile à ceux qui l’avaient employé.
Thucydide, qui a décrit la maladie après en avoir été atteint, et après l’avoir observée sur d’autres individus, déclare carrément qu’aucune invention humaine ne conjura le fléau : prières dans les temples, consultations d’oracles, d’autres expédients semblables, tout fut inutile et on subit le mal sans rien faire de plus pour le conjurer.

 

La peste à bubons
La peste à bubons, pestis inguinaria, désola l’Italie en 563 et en 594. L’épidémie de 563 ne borna pas ses ravages à la Péninsule ; elle régna aussi dans d’autres contrées, notamment dans la Gaule. Selon les auteurs qui, en parlant des maladies du 6e siècle, les ont désignées d’une manière caractéristique, c’est la première épidémie de pestis inguinaria qui survint dans l’Italie et dans la Gaule.
D’après divers auteurs de cette époque, un phénomène étonnant annonça la peste. On vit sur les murailles et sur les portes des maisons, sur les vases, sur les vêtements apparaître des taches livides, et plus on les lavait, plus ces taches devenaient sensibles…
Un an après, se déclara la peste à bubons. Dans les aines (inguina), dans les aisselles se formaient des glandes du volume d’une noix ou d’une datte. Les malades, en proie à une fièvre ardente, perdaient la raison ; la mort s’ensuivait le plus souvent au troisième jour. Mais ceux qui passaient ce 3ème jour guérissaient.
De quelque côté que l’on tournât les yeux, ce n’était que deuil et désolation. L’épouvante était telle qu’à la seule nouvelle de l’explosion du mal, on prenait la fuite. Le fils laissait le père sans sépulture ; les parents oubliaient leurs enfants ; d’un autre côté, ceux qui voulaient remplir les devoirs de la piété filiale sacrifiaient leur vie.
De l’Italie et de la Gaule, la peste se répandit jusqu’aux extrêmes frontières des peuples alémaniques et bavarois.

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Et dans le récit des malheurs qui affligèrent les peuples de l’Occident durant ce 6e siècle, il faut signaler également la variole. Aisément reconnaissable, cette maladie ravagea aussi l’Italie et la Gaule.

À peine furent-ils délivrés de la peste et de la variole, qu’une autre maladie fondit sur eux. Pris de violentes douleurs de tête, le malade perdait connaissance. Le plus souvent, il expirait subitement, en éternuant ou en baillant. En France, en Espagne, en Italie, dans tous les pays où l’on prit note des événements, il est fait mention de cette maladie, sorte de fièvre catarrhale, appelée influenza. Cette grippe était caractérisée par une irritation de la muqueuse des voies aériennes et par une lassitude extrême, accompagnées d’une forte fièvre.

La terreur qu’inspirèrent ces morts subites fit contracter l’habitude, conservée encore de nos jours par les personnes âgées de nos campagnes, de faire le signe de la croix devant la bouche, au moment où elles éternuent. Quant à l’habitude de saluer ceux qui éternuent et de leur dire : Que Dieu vous bénisse (helf dir Gott !), elle peut venir de cette époque…

 

Sources :
– Revue d’Alsace, année 1855, volume 6 – extraits d’un article de LACH, docteur en médecine de Colmar

– http://fr.wikipedia.org/wiki/Thucydide

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