Ancien métier : bourreau

 

Métier d’un autre temps, le bourreau était un exécuteur de la haute justice, sans état d’âme et faisant son métier du mieux qu’il pouvait. De père en fils, des générations de bourreaux ont œuvré dans la région pour faire respecter la loi.

Ce travail de bourreau était nécessaire pour le bon fonctionnement de la société du 17e siècle jusqu’au 20e siècle.

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Contrairement aux idées reçues, le bourreau n’était ni un monstre ni un détraqué. Son travail consistait à appliquer à la lettre les gestuelles prédéfinies qui étaient destinées à faire avouer les présumés coupables ou tout simplement expédier les coupables dans l’autre monde, et ceci avec efficacité.
Souvent, un vrai scénario était utilisé lors de l’application d’une peine. Devant une foule considérable, il maniait le fouet, marquait au fer rouge ou exécutait par pendaison, glaive, crémation…) Ce « spectacle » devait, en principe, enlever à la population toute envie de larcin ou de meurtre. Contrairement à l’idée reçue, le bourreau ne portait ni masque ni cagoule lors des exécutions.

Ses conditions de vie n’étaient guère enviables, comme tous ceux qui exerçaient des métiers en contact de cadavres. Craint et méprisé, il était souvent contraint d’habiter en dehors des villes, vivant en paria. Face à cet ostracisme forcé, les familles de bourreaux se fréquentaient et la fille d’un bourreau épousait régulièrement un jeune exécuteur, créant ainsi de véritables dynasties. L’Église consentait d’ailleurs au mariage consanguin dans ces familles. Ce jeu de mariages a permis à certaines branches de prospérer durant plusieurs générations.
Dans les villes de Haute-Alsace (Altkirch, Thann, Masevaux, Landser, Ferrette…) certaines familles furent célèbres, comme par exemple les Ostertag.

Les Ostertag
En mars 1655, Mathias Ostertag (der Scharfrichter = le bourreau) reçut pour lui, son épouse Madeleine Heidenreich et ses descendants, l’autorisation d’habiter la ville d’Altkirch. Ce document est conservé au Musée d’Altkirch et indique que le bourreau altkirchois jouissait d’une « grande considération » auprès de la population et que la dernière exécution au gibet d’Altkirch eut lieu en 1782.
Parmi leurs enfants, le fils Adolphe épousa en premières noces Anne Barbe Ginter et en secondes noces Marie Madeleine Hof. Ses épouses ainsi que sa mère étaient issues de familles de bourreaux.
Le métier de bourreau étant restrictif (il n’y avait qu’un seul bourreau par seigneurie), les descendants devinrent chirurgiens, médecins, vétérinaires ou ecclésiastiques. Ceux des Ostertag d’Altkirch s’établirent à Ferrette et à Durmenach. Un des fils d’Adolphe, Georges, né à Altkirch en 1704, fut curé à Carspach où il décéda en 1770. Un autre Georges, Georges Frédéric, né à Durmenach en 1742, fut curé à Rouffach. Il émigra en Souabe et revint à Rouffach où il finit ses jours en 1813.
À Courtavon, Madeleine Hinfeld mit au monde en 1718 un enfant illégitime prénommé Joseph. Le curé précisa dans le registre que le père supposé était Georges Arnulf Ostertag, le fils du bourreau de Ferrette.

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Quelques noms de bourreaux ayant exercé à Mulhouse de 1507 à 1825 :
Louis Kraemer, Hans Waltz, Hans Hummel, Jacques Rueb, Gaspard Fues, Martin Hummel, Ulrich Grossholtz, Michel Grossholtz, Jérôme Gunther, Hieronimus Bruckner,Chrétien Burckhardt, Stéphan Hirschfeld, Jean-Henri Naeher, Rodolphe Volmer, François Pierre Mengis, Jacques Mengis.

À partir de 1791, il n’y eut plus qu’un exécuteur par département.

Marcel Chevalier fut le dernier bourreau de France. Marié à Marcelle Obrecht, nièce de l’exécuteur André Obrecht, il exécuta en 1977 le dernier guillotiné de France. Après l’abolition de la peine de mort, en 1981, la guillotine fut rangée dans son hangar de Fresnes et Marcel Chevalier et ses aides furent « remerciés ».

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Extrait d’un article du site « Journal d’un avocat » paru le 9 octobre 2006
Ça se passait comme cela…

[…] L’exécuteur entre avec une paire de ciseaux et découpe le col de la chemise de X et les cheveux qui recouvrent la nuque. Il lui tend ensuite une cigarette, qu’il accepte, et lui propose un verre de cognac, qu’il accepte également. Sa main tremble de plus en plus. Il le boit très lentement, essayant de retarder l’inévitable. Dans le couloir, personne ne dit un mot, les regards s’évitent, le directeur d’établissement regarde régulièrement sa montre.

Il finit par faire signe au gardien-chef, qui entre avec ses deux hommes, qui prennent chacun fermement un bras de Quidam. Le gardien-chef lui lie les poignets dans le dos.
« Non… » dit-il d’une voix étranglée. Les gardiens le sortent de la pièce, font une pause devant l’avocat.
« Votre… Votre maman me fait vous dire qu’elle vous aime. Elle vous aimera toujours. » Sa voix se brise à cause de l’émotion. Les yeux de X s’emplissent de larmes, et il dit « Merci… Dites lui que je l’aime aussi » en souriant. Sur un signe de tête du directeur d’établissement, les gardiens conduisent X dans la cour, où attendent les deux assistants de l’exécuteur.
Tout le monde sait qu’à partir du moment où le prisonnier voit la guillotine, il faut aller très vite. Les gardiens le plaquent contre la bascule. L’exécuteur se place à côté du montant droit, près du déclic, le levier qui libérera le mouton, le poids où est fixé le couteau. L’un des assistants se place face à la lunette, derrière le paravent de bois, qui le protègera des éclaboussures. Le troisième, voyant tout le monde en place, fait pivoter la bascule et la pousse sur des roulements qui amènent la tête au-delà de la lunette. L’exécutant en chef laisse tomber la partie haute de la lunette, qui en écrasant la nuque étourdit le condamné. L’assistant situé en face du condamné, qu’on surnomme le photographe, saisit la tête entre ses mains. L’exécuteur en chef abaisse le déclic. Un bruit de roulement, puis comme un coup de marteau sur une planche, suivi de deux bruits d’éclaboussure : deux jets de sang ont giclé de chaque côté sur les pavés de la cour.
L’assistant soulève un côté de la bascule à peine le couteau tombé et fait chuter le corps dans la corbeille. Le photographe y dépose la tête et referme le couvercle. Le gardien-chef présente au chef d’établissement le procès verbal d’exécution, qu’il signe puis remet au représentant du parquet.

 

Sources : Centre Départemental d’histoire des familles CDHF – Généalogie Alsace-Lorraine-Vosges
Site « Journal d’un avocat », article : ça se passait comme ça…
Images : Wikipedia

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