Souvenez-vous de la Grande Guerre

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Étions-nous Français ou Allemand ? Cette question revient régulièrement quand nos anciens racontent leurs guerres. Bonne question ! Notre région a connu tellement d’invasions, d’occupations ou d’annexions qu’on pourrait y perdre son latin.
Il y a 96 ans, le 11 novembre, l’armistice était signé, mettant fin au conflit mondial de 1914-1918. En ce jour de commémoration, il est important de se rappeler quelques faits historiques qui se rattachent à notre histoire alsacienne.

Après la guerre de 1870 et la défaite de Napoléon III, le territoire français de l’Alsace-Lorraine est cédé à l’Empire allemand sous la couronne prussienne. Et l’Alsace restera allemande pendant quarante ans, jusqu’à la fin de la Première Guerre mondiale, en 1918.

Dès le 1er août 1914, les Alsaciens reçurent les directives concernant la mobilisation générale. Et c’est sous l’uniforme allemand qu’ils durent combattre. Le Sundgau étant une région frontalière avec la France, les combats furent très rudes.
Les premières lignes étaient de véritables postes avancés, avec tranchées et boyaux se reliant entre eux. Les Français investissaient quelques villages, puis étaient repoussés.
Les combats devenant de plus en plus violents, les Allemands évacuèrent les habitants des villages placés sur le front. Une charrette tirée par un ou deux chevaux (pour les plus chanceux) dans laquelle étaient empilés matelas, chaises, ustensiles de cuisine, etc, et les voilà partis, sans savoir qui pourra héberger leur famille et sans savoir si leur exil durera quelques mois ou plusieurs années.
Les villages subirent d’effroyables bombardements. Et, à partir de 1916, les tirs chimiques composés de gaz au chlore, phosphore, moutarde, etc. étaient utilisés.

Déplacés vers l’arrière, les Sundgauviens civils étaient désorientés.

Imaginez, leurs fils combattaient les soldats français et, au fond de leur cœur, ils désiraient que l’Allemagne perde. Peuple déchiré entre les deux camps. Les troupes allemandes traitaient les civils alsaciens de « Franzosenkopf » (têtes de Français) et les troupes françaises les traitaient de « sales boches ».
Et qu’ils aient combattus sous l’uniforme français ou allemand, ces jeunes garçons ne demandaient qu’à vivre, épouser une gentille fille et faire deux ou trois petits !

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Drame de l’Alsace : deux frères, l’un dans l’armée française, l’autre dans l’armée allemande

 

Cette guerre fut une véritable boucherie humaine. Je voudrais vous faire lire cette lettre écrite par un jeune homme de 23 ans, en avril 1915.

Mes chers parents,
Si cette lettre vous parvient ça sera que je serai foutu. Je vous prie de ne pas trop vous chagriner. Efforcez-vous de vivre avec mon souvenir et que mon image vous soutienne jusqu’au bout. Je serai allé rejoindre un peu avant vous le pays où l’on n’existe qu’à l’état de souvenir. Efforcez-vous d’entretenir dans ces pensées Émile, mon cher frère : qu’il ne m’oublie pas et je désire qu’il soit fier de moi. Mettez-le au lycée dans une classe de sciences et qu’il fonde une famille afin de conserver notre nom, notre sang et notre souvenir.
En Dieu mes chers parents, soyez bénis. Je vous ai bien aimés beaucoup beaucoup.
Léon-Auguste

Un extrait d’une lettre d’Adolphe Wegel, écrite en 1915 :
Je ne sais pas si je pourrais dormir dans un lit à présent, on est habitués à coucher par terre ou sur de la paille quand on peut en trouver. Il y a bien deux mois que je ne me suis pas déshabillé, et j’ai enlevé mes souliers cette nuit pour dormir ; il y avait au moins quinze jours que je ne les avais pas quittés.
Je vais te donner quelques détails comment nous avons passé la nuit dans la tranchée. Celle que nous avons occupée a une longueur de cent mètres à peu près, construite à la lisière d’un petit bois ; elle est profond d’un mètre, la terre rejetée en avant, ce qui fait que l’on peut passer debout sans être vu. La largeur est généralement de quinze centimètres et l’on fait de place en place des endroits un peu plus larges de façon à pouvoir se croiser quand on se rencontre. Dans le fond de la tranchée et sous le terrain, on creuse de petites caves où un homme peut tenir couché, c’est pour se garantir des éclats d’obus.

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N’oubliez pas, tous ces hommes, jeunes ou vieux, s’imaginaient partir pour un été et châtier un ennemi. Ils ne savaient pas qu’ils allaient connaître le plus terrible des conflits, le seul qui ait été qualifié de « Grande Guerre ».

En 1914, cette guerre enrôla des millions d’hommes : 5 millions de Russes, 3,5 millions d’Austro-hongrois, 5 millions d’Allemands et 4 millions de Français, sans compter les centaines de milliers de Britanniques volontaires qui s’enrôleront en masse dans un pays qui ne connaît pas le service militaire obligatoire. Tous seront persuadés de leur bon droit et tiendront à montrer leur fidélité à leur drapeau, à leur souverain ou à leur gouvernement.

fleche En savoir plus :
– Déclenchement du conflit de la Grande Guerre et sa chronologie dans l’article de iSundgau du 15 novembre 2014

Je vous recommande également les deux livres de Vincent Heyer et Bernard Burtschy :
1914-1918 Première guerre mondiale sur le front de la Largue
1914-1918 Première guerre mondiale sur le front d’Altkirch à Dannemarie

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